Virgile et l'ascendance divine de l'Empire

Après la fin sanglante des guerres civiles, Octave, devenu Auguste, doit transformer son statut de vainqueur militaire en celui de dirigeant légitime et incontesté. Pour cela, il charge le poète Virgile de composer l’Énéide, une épopée monumentale qui ne raconte pas seulement l'origine des romains, mais aussi et surtout la légitimité divine de la dynastie impériale.

Auguste en tant que Pontifex Maximus (détail). L'empereur, paré de la toga sur la tête, s'affiche en grand prêtre, incarnant l'union du pouvoir politique et religieux qu'Énée et Vénus lui conféraient. - Photo Mark Cartwright (CC BY-NC-SA)

Énée, le fils de Vénus : une destinée cosmique

Virgile donne à Rome des origines prestigieuses en la rattachant à l'héritage troyen. Le héros de l'épopée est Énée, prince pieux et courageux, fils de la déesse de l'amour, Vénus (Venus).

Le long et difficile voyage d'Énée vers l'Italie est présenté non pas comme une fuite, mais comme l'exécution d'une volonté divine. Le récit est jalonné de prophéties (Vaticinium) qui promettent à sa descendance un empire sans fin. En faisant d'Énée le destinataire de cette prophétie, Virgile ancre la fondation de Rome dans un plan cosmique et éternel. Le message est clair : la grandeur de Rome n'est pas le fruit du hasard, mais l'accomplissement d'une promesse divine.

Iule et l'ascendance des Julio-Claudiens

Le point central de cette entreprise idéologique est le fils d'Énée, Ascagne, souvent désigné sous le nom de Iule.

En se proclamant descendant direct de Iule, la gens Iulia (la famille de Jules César et d'Auguste) s'attribue l'ascendance la plus noble qui soit : une lignée qui remonte directement à une déesse olympienne, Vénus, et au fondateur mythique de la race latine.

L’Énéide est ainsi la charte fondatrice du nouveau régime. Elle justifie le pouvoir d’Auguste comme l'aboutissement logique et nécessaire de l'histoire romaine. La poésie devient un puissant instrument de propagande politique, transformant le premier empereur de la Pax Romana en l'élu des dieux et l'héritier du destin troyen.